Kimberley Process Civil Society Coalition

Des illusions à l’action : réformer le Processus de Kimberley pour le rendre responsable devant les communautés impactées par les diamants

Discours d’ouverture de la Coalition de Société Civile à la réunion intersessionnelle du Processus de Kimberley de 2025 à Dubaï

Placer la barre plus haut : ne pas uniquement célébrer les bonnes pratiques mais s’attaquer aux lacunes

La présidence du PK a baptisé l’année 2025 “année des meilleures pratiques” pour le Processus de Kimberley. La Coalition de la société civile reconnaît la nécessité de mieux partager et intégrer les enseignements tirés. Cependant, même si nous encourageons les meilleures pratiques, le Processus de Kimberley devrait être plus ambitieux que de simplement souligner ce qu’il fait de bien. Il devrait cesser de fermer les yeux sur les abus et les mauvaises pratiques, dont les communautés affectées par l’extraction des diamants sont trop souvent victimes. Les meilleures pratiques doivent placer la barre haute. Le respect des meilleures pratiques énumérées dans le Cadre 7 (Frame 7) devrait être une exigence minimale, mentionnée dans la définition des diamants de conflits, vérifiée et prise en compte dans le système d’évaluation par les pairs.

La Coalition de la société civile ne cesse de le signaler, tout récemment dans son documentaire « Beyond Shining Illusions – Au-delà des brillantes illusions », trop de diamants restent aujourd’hui entachés de violence, de violations des droits humains et d’atteintes à l’environnement. Les témoignages des communautés affectées par la violence des forces de sécurité, les relations conflictuelles entre les mineurs artisanaux et les entreprises minières ainsi que les graves impacts environnementaux et la pollution sont plus que révélateurs.

Pour réorienter les échanges sur ce qui compte vraiment, nous invitons tous les Participants et Observateurs du PK à regarder ensemble ce soir le documentaire et à échanger tout au long de la semaine, et au-delà, sur la manière de remédier aux dommages causés par l’extraction des diamants sur les communautés touchées.

Reconnaître les lacunes du Processus de Kimberley est la première étape nécessaire à tout progrès, et les améliorations progressives surpassent les illusions ou les promesses vides.

Faire face à la réalité : les violations persistantes des droits humains exigent une réforme urgente et sérieuse du Processus de Kimberley

L’année dernière, la Coalition de la société civile a été attirée par le slogan de la présidence du PK pour 2024, à savoir “l’année des réalisations”. La Coalition attend toujours du PK qu’il mette en œuvre les réformes. Cela nécessite un nouvel effort collectif alors que nous entrons dans la dernière année du cycle de réforme du PK.

S’il est vrai que le système de certification du Processus de Kimberley a contribué à résoudre certains conflits nourris par les diamants en Afrique dans le passé, les conflits liés aux diamants persistent aujourd’hui sous diverses formes. Par conséquent, la redéfinition des diamants de conflits est une priorité absolue. Cette dernière doit faire référence à la violence généralisée ou systématique et aux violations graves des droits humains, qu’elles soient commises par des groupes rebelles, des criminels, des mercenaires, des terroristes ou des forces de sécurité privées ou publiques.

Au-delà de l’embargo : responsabilité partagée pour lutter contre la contrebande et la violence dans le secteur diamantifère en République centrafricaine

Lors de la session plénière de l’année dernière, le Processus de Kimberley a levé son dernier embargo sur les diamants de la République Centrafricaine (RCA). La Coalition de la société civile a accueilli cette décision de manière favorable, car l’embargo a finalement davantage soutenu la contrebande que protéger les communautés minières qu’il était censé aider.

Il sera important, au cours de cette intersessionnelle du PK, de savoir ce qui a changé dans le secteur du diamant de la République Centrafricaine depuis la levée de l’embargo. Nous encourageons ce processus à mener des discussions ouvertes et orientées vers des solutions sur les défis qui demeurent et les progrès nécessaires pour les mineurs artisanaux et les communautés affectées en RCA.

La fin de l’embargo ne doit pas marquer la fin de la responsabilité du Processus de Kimberley, du gouvernement de la République Centrafricaine ou de la communauté internationale à s’attaquer aux problèmes persistants des conflits, de la fraude et de la pauvreté liés au secteur du diamant de la République centrafricaine. Des discussions ouvertes sont essentielles.

Pas de responsabilité sans transparence et traçabilité

Le déficit de transparence du Processus de Kimberley est une préoccupation majeure de la société civile. Cette situation est exacerbée par le fait que les documents et les rapports du Processus de Kimberley ne sont pas accessibles ou le sont difficilement. Les règles de confidentialité obscurcissent également les activités du Processus de Kimberley et constituent un obstacle à la redevabilité.

Le Processus de Kimberley devrait tirer les leçons d’autres initiatives en matière de transparence et de diligence raisonnable, telles que l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) et l’OCDE, où la régularité et la transparence des rapports sont des principes essentiels.

Nous pouvons arguer que l’incapacité du PK à fournir un forum de discussion et de coopération sur les questions urgentes liées au commerce des diamants a largement contribué à l’incertitude qui règne actuellement dans la chaîne d’approvisionnement. Les pays du G7 tentent à présent d’agir indépendamment pour faire progresser les exigences de traçabilité dans le secteur du diamant.

Les consommateurs méritent de connaître le parcours de leur diamant naturel entre la mine et la bijouterie, ainsi que les dommages qu’il peut causer sur son parcours. En permettant à des pierres de différentes origines d’être mélangées dans des parcelles étiquetées “origine mixte”, le PK efface efficacement la traçabilité. En outre, la traçabilité du parcours d’un diamant s’arrête à mi-chemin, lorsque la pierre est traitée, taillée ou polie. L’accord récent autorisant les pays commerçants à mentionner facultativement les pays d’origine sur les certificats du Processus de Kimberley – sans exiger de preuves ou de contrôles – continue de tromper les consommateurs en leur faisant croire que leurs diamants proviennent de sources responsables.

L’amélioration de la traçabilité dans la chaîne d’approvisionnement en diamants devrait être la préoccupation de tous les acteurs.

Pour conclure, permettez-moi de rêver de prononcer les remarques de clôture de cette intersessionnelle avec un vocabulaire entièrement différent et de nouveaux messages d’espoir pour les communautés touchées par l’exploitation des diamants. Pour y parvenir, le Processus de Kimberley doit mettre au point un véritable système de diligence raisonnable pour le secteur du diamant, digne de son nom et comblant l’énorme lacune qui existe aujourd’hui dans la gouvernance des diamants.

Reconnaissons que le Processus de Kimberley doit être profondément remanié pour pouvoir remplir de manière crédible son mandat de prévention des conflits et de contribution au développement durable.

Jaff Bamenjo
Coordinateur de la Coalition de la société civile du PK

BEYOND SHINING ILLUSIONS: Un nouveau documentaire expose les conséquences ignorées de l’exploitation industrielle des diamants

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