Kimberley Process Civil Society Coalition

Discours d’ouverture de la société civile à la session intersessionnelle du Processus de Kimberley 2023

Cette année marque le 20e anniversaire du système de certification du Processus de Kimberley. Il n’y a toutefois guère de raisons de se réjouir, car la confiance entre les participants n’a jamais été aussi faible.

Bien que la définition restreinte des diamants de conflit permette à l’industrie de vendre des diamants comme étant exempts de conflits, elle cache cependant aux consommateurs les graves violations des droits de l’homme qui se produisent lors de l’extraction de ce minerai, gage d’amour et de prospérité. Nous souhaitons la bienvenue à la nouvelle présidente du Conseil Mondial du Diamant (WDC), qui a plaidé en faveur de normes plus exigeantes dans l’industrie du diamant, et nous encourageons le Conseil Mondial du Diamant à placer la barre haute pour une nouvelle définition des diamants de conflit.

L’élargissement attendu depuis longtemps, de la définition des diamants de conflit du Processus de Kimberley, devrait inclure les diamants associés à une violence généralisée ou systématique et à des violations graves des droits de l’homme, qu’elles soient commises par des groupes rebelles, des criminels, des terroristes, des forces de sécurité privées ou publiques ou tout autre acteur gouvernemental.

Les communautés locales affectées par l’extraction de diamants savent très bien que les conflits ne se résument pas à des rebelles luttant contre des gouvernements légitimes. Lorsque les choses tournent mal, ce sont les communautés qui sont confrontées à la violence et aux violations des droits de l’homme. Le Processus de Kimberley devrait être là pour elles aussi. Le secteur du diamant est confronté à de nombreux défis qui l’empêchent de réaliser pleinement son potentiel en tant que moteur de la paix et du développement. Ces enjeux incluent les droits de l’homme, les droits des travailleurs, les impacts environnementaux, la répartition équitable des bénéfices, la corruption, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, etc. Nous demandons instamment au PK d’aider le secteur du diamant à se montrer à la hauteur de son potentiel et d’adopter une définition ambitieuse qui réponde aux besoins réels et aux défis concrets des communautés affectées par l’extraction de diamants.

Nous félicitons le Zimbabwe d’avoir entamé le processus de promotion de l’exploitation minière responsable par le biais de l’audit de l’exploitation minière responsable récemment lancé, qui couvre d’autres secteurs miniers et le secteur des diamants. Nous recommandons au Zimbabwe d’inclure les Organisations de la Société Civile et les communautés ou d’autres parties prenantes afin de rendre le processus beaucoup plus inclusif. Nous encourageons le PK à considérer cela comme un modèle pour tester la mise en œuvre des principes du cadre 7 (Frame 7) sur l’approvisionnement responsable.

Mesdames et Messieurs,

En raison de son mandat restreint, le Processus de Kimberley n’accepte actuellement qu’un seul cas de pays où il souhaite empêcher les diamants de conflit d’entrer dans sa chaîne de certification : il s’agit de la République centrafricaine. Cependant, nous devons à nouveau nous demander si le Processus de Kimberley s’acquitte suffisamment bien de cette seule tâche et cela particulièrement à la lumière des rapports faisant état de la persistance de la contrebande et d’une société liée aux mercenaires russes de Wagner qui a réussi à exporter des diamants de la République Centrafricaine, avec des certificats du PK, vers Dubaï et Anvers.

Alors que les diamants continuent de passer à travers les mailles du filet du PK, les populations de la République centrafricaine, et en particulier celles qui vivent dans les zones minières ou à proximité, continuent de souffrir de l’insécurité, des privations, de la violence, de la torture, des meurtres et de bien d’autres préjudices inimaginables. Nous attendons avec impatience le rapport du groupe d’experts des Nations Unies sur la situation sécuritaire dans le pays.

Le PK doit trouver une solution qui concilie les intérêts communautaires, le développement économique national et la protection des communautés locales en RCA.

Si le Processus de Kimberley est réellement un mécanisme de prévention des conflits qu’il prétend être, il devrait au moins avoir pour objectif de mettre fin à ces souffrances, au lieu de se contenter d’essayer d’éviter qu’elles n’aient un impact négatif sur le commerce du diamant et la confiance des consommateurs.

Nous répétons encore une fois que le fait que le système de certification du PK n’aborde pas les conflits et les violences actuels, nuit à la crédibilité de la certification. Cela inclue l’agression d’un participant du PK par un autre, à laquelle le lucratif commerce des diamants contribue.

En ce moment même, les pays du G7 discutent d’un cadre commun de traçabilité des diamants afin de mettre fin au financement des conflits.

En ce moment même, les pays du G7 discutent d’un cadre commun de traçabilité des diamants afin de mettre fin au financement des conflits. Nous avons régulièrement utilisé ce forum pour appeler à l’intensification des efforts en vue d’améliorer la traçabilité des diamants. Le Processus de Kimberley tend à aller à l’encontre de cet objectif plutôt qu’à le soutenir. Tout d’abord, par son système de certificats d’origine mixte qui ne prévoit aucune exigence, ni même aucune recommandation, pour conserver la trace du pays d’origine de l’exploitation minière tout au long des nombreuses transactions de diamants sur le chemin de la mine au marché.

Un autre obstacle à la traçabilité que pose le Processus de Kimberley est l’idée encore dominante selon laquelle ce système a résolu tous nos problèmes. Ce discours a souvent été utilisé pour faire valoir que ce secteur n’a pas besoin de se joindre aux efforts interprofessionnels mondiaux visant à informer les consommateurs sur l’origine de leurs produits. Heureusement, les choses commencent à changer. Il est douloureusement révélateur de la pertinence du PK aujourd’hui qu’il fasse partie du problème plutôt que de la solution à ce plus grand changement de paradigme dans l’industrie du diamant au cours de ces 20 dernières années.

Mesdames et Messieurs,

À la lumière de la méfiance et de l’immobilisme qui dominent ce forum, nous avons plus que jamais besoin d’un regard neuf sur ce que nous faisons ici. Nous avons besoin d’une évaluation indépendante de ce que le Processus de Kimberley fait et ne fait pas, de ce qu’il fait bien, de ce qu’il peut faire mieux et des domaines dans lesquels il échoue complètement. Nous devons mieux comprendre qui bénéficie et devrait bénéficier de tout le temps et de toutes les ressources consacrées à ce projet. S’agit-il des producteurs de diamants ou des consommateurs, des communautés ou de l’industrie, des citoyens ou des gouvernements ?

The KP needs to put people first, it has the leverage to do that, and it would make diamonds shine brighter. Here in Zimbabwe, 15 years ago families were displaced from their ancestral homeland in Marange to a government farm called Arda Transau. The promises that were made for piped water, electricity, land for cultivation, good schools and accommodation for teachers were never lived up to. Today the displaced families are drinking water from an unprotected well. The houses they live in are life threatening due to wide cracks that have developed. The families have no alternative livelihoods. The KP Civil Society Coalition (CSC) is deeply concerned with the living conditions of the displaced families and with the lack of development in Marange itself.

En Sierra Leone, des milliers de personnes ont été l’objet de déplacements forcés lorsque l’extraction de diamants a commencé à Koidu en 2005. En 2007 et 2009, les forces de sécurité ont tiré sur des manifestants pacifiques et inoffensifs, faisant plusieurs morts et de nombreux blessés. Personne n’a eu à répondre de ces crimes jusqu’à ce jour. De nombreuses personnes doivent encore être réinstallées dans un endroit où les explosions ne détruisent pas leurs maisons, où l’exploitation minière n’épuise pas leurs sources d’eau potable et où elles ont la possibilité de trouver d’autres moyens de subsistance. Aujourd’hui, une montagne de résidus artificiels dangereuse et inesthétique a été créée, surplombant la ville de Koidu.

Au cours des deux dernières années, au moins trois digues de résidus de mines de diamants industrielles se sont rompues : la mine Catoca en Angola, la mine Jagersfontein en Afrique du Sud et la mine Williamson en Tanzanie. Ces ruptures ont causé la mort, la destruction et la dévastation des communautés voisines de ces mines où des cours d’eau ont été gravement pollués. Ces catastrophes n’étaient pas nécessaires et auraient pu être évitées grâce à un meilleur contrôle et une meilleure gestion. Pour ce faire, l’industrie doit cesser de se focaliser sur les gains rapides pour satisfaire les actionnaires et privilégier la création de valeur durable pour les pays et les communautés.

The lack of effort to mitigate the human and environmental toll of the Catoca mine disaster continues to concern us. Despite reports by several experts and the Congolese Government documenting the causes and consequences of the pollution, little has been done to address these. It is the fourth time we have raised attention in our opening statement to this forum, but the KP remains silent, once again showing the world its limitations in addressing and dealing with the current challenges related to diamond exploitation.

Mesdames et Messieurs,

Let us mark this anniversary meeting by critically assessing where the KP fails to work for the people and by committing to make them benefit. It is time for external scrutiny through a thorough external evaluation of the work so far. If the KP is not to become irrelevant it has to act now and assume responsibility for the impacts – both positive and negative- that diamond mining can have, not only on diamond mining communities but on society as a whole. Communities and consumers need to finally get clarity on what can be expected from this scheme. 

Dr. Michel YOBOUE

Pour la Coalition de la Société Civile

info@kpcivilsociety.org

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