Les 30 et 31 janvier, les présidents des groupes de travail du Processus de Kimberley (PK) se réunissent à Dubaï pour établir l’ordre du jour et les principales priorités du forum pour 2024. Cette réunion à huis clos se tient sous la présidence du PK 2024 des Émirats arabes unis, représentés par M. Ahmed Bin Sulayem.
À cette occasion et à la lumière des graves défis auxquels sont confrontés le PK et l’industrie du diamant dans son ensemble, la Coalition de la Société Civile (CSC) a souligné ses préoccupations essentielles.
Réunion des présidents des groupes de travail du PK – Remarques d’ouverture de la Coalition de la Société Civile.
La Coalition de la Société Civile adresse ses félicitations à l’honorable Ahmed Bin Sulayem pour le début de son second mandat à la présidence du Processus de Kimberley (PK). Alors que les Émirats arabes unis assument la présidence du PK, nous vous encourageons à donner la priorité à l’accélération des efforts de réforme du PK et à la résolution de problèmes cruciaux tels que les violations des droits humains, la transparence, la traçabilité et la lutte contre le blanchiment d’argent dans le commerce des diamants. La Coalition de la Société Civile s’engage à travailler en collaboration avec vous pour rendre l’industrie du diamant équitable, durable et éthique pour tous.
L’industrie du diamant est aujourd’hui confrontée à des défis importants. Les associations avec les conflits et le désespoir sont à nouveau au premier plan. Les communautés vivant entourées de richesses diamantifères n’en voient ni n’en ressentent les bénéfices. Seule une sérieuse réforme permettra au PK d’inverser la tendance. La Coalition de la Société Civile du PK plaide depuis longtemps en faveur d’une réforme du PK et craint que les réformes indispensables n’aient, une fois de plus, pas une chance équitable. Le PK risque ainsi de saper les fondements de l’industrie qu’il prétend protéger. Depuis plus de 20 ans, l’étroite définition des diamants de conflit est une question sujet à controverses, et il est plus que temps d’adapter le Processus de Kimberley (PK) à la réalité actuelle. La mise en œuvre des principes d’approvisionnement responsable du Cadre7 (Frame7) est essentielle et urgente. Ce sont de belles paroles sur le papier, mais il est nécessaire de les traduire en actes afin qu’elles aient un impact. C’est pourquoi nous demandons instamment à tous les participants au PK d’intégrer le Frame7 dans leur processus d’examen par les pairs, ce qui permettra de rendre compte des progrès réalisés chaque année et de les évaluer lors des visites d’examen par les pairs.
La société civile est déçue par l’incapacité du PK à examiner sérieusement sa contribution actuelle et potentielle à l’exacerbation ou à l’atténuation des conflits en cours, en particulier à la guerre de la Russie à l’encontre de l’Ukraine et au conflit de longue durée en République centrafricaine (RCA). Comment le PK peut-il être pris au sérieux s’il ne peut même pas discuter du rôle des diamants dans le financement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine ? Quel rôle le PK joue-t-il encore dans la prévention des conflits s’il n’est pas capable d’avoir une seule discussion constructive sur l’élaboration d’une voie à suivre pour la RCA ? Pour sortir de cette impasse, nous devons adopter une feuille de route complète pour la RCA qui comprenne une surveillance continue, une assistance technique, des examens sur le terrain et une meilleure coopération régionale entre les autorités minières, l’application de la loi, l’industrie et la société civile.
D’un point de vue positif, la crise actuelle du secteur du diamant donne une impulsion indispensable aux efforts visant à améliorer la traçabilité. Sans connaître l’origine d’un diamant, personne ne peutprétendre de manière crédible qu’un diamant a fait du bien ou qu’il a empêché les diamants de provoquer des conflits ou des violations des humains. Le Processus de Kimberley complique actuellement les efforts visant à rendre la chaîne d’approvisionnement en diamants plus transparente, au lieu de les faciliter. Les certificats d’origine mixte, largement utilisés, aveuglent les bijoutiers et les consommateurs qui veulent s’assurer que leurs achats ne contribuent pas à un préjudice. Une autre approche est possible et son développement devrait être une priorité pour le PK.
La dernière réunion plénière du PK au Zimbabwe a mis en lumière une question cruciale que nous devons aborder, bien que nous n’ayons malheureusement pas pu nous mettre d’accord sur le communiqué final. Il est temps de réorienter véritablement le Processus de Kimberley vers les communautés, en faisant d’elles les premiers bénéficiaires de ce processus. Nous espérons toujours que les communautés affectées par les diamants auront leur place dans un forum spécial du PK. Toutefois, il ne peut s’agir d’un exercice unique. Il doit s’agir d’un effort profond et continu pour s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté, de la négligence et du désespoir parmi les communautés vivant dans ou à proximité des exploitations minières de diamants. Ce n’est qu’au prix de ces efforts que nous pourrons rendre le PK à nouveau pertinent. Prenons cette tâche au sérieux et travaillons à un avenir meilleur pour ces communautés.
Michel Yoboué
Coordonnateur de la Coalition de la Société Civile
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